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Le blog de Charles Nicolas
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  • Dans une société déchristianisée où les mots perdent leur sens, où l'amour et la vérité s'étiolent, où même les prédicateurs doutent de ce qu'ils doivent annoncer, ce blog propose des textes nourris de réflexion biblique et pastorale.
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30 septembre 2022

Unité de l'Eglise et intergénérationalité (1)

 

 

L'intergénérationnalité et l'unité de l'église 

26 mars 2022 - Charles NICOLAS 

Ma mère a 92 ans et n'y voit plus beaucoup. Quand je travaille à son jardin en fin d'après-midi, elle me dit : Charles, c'est l'heure de rentrer, voyons. On n'y voit plus rien ! Mais pour moi, on y voit encore comme en plein jour. Alors, je lui réponds : Maman, je n'ai pas encore 92 ans ! (si j'y arrive un jour).

Un peu plus tard, à la fin du repas, je suis déjà en train de débarrasser la table alors qu'elle achève lentement de manger son yaourt. Là, c'est moi qui la bouscule inutilement. Je me souviens du commandement du Seigneur (avec une promesse) : Honore ton père et ta mère.

De plus, comme ma mère est chrétienne, c'est aussi ma sœur dans la foi – et c'est donc le corps de Christ qui est malmené si je la malmène ! Et le corps de Christ, c'est Christ ! (1 Co 12.12).

Pendant l'été de 1850, Charles Spurgeon (qui avait alors 16 ans) partit s'installer à Cambridge. Eprouvant le désir de s'associer aux chrétiens de Cambridge, Spurgeon se joignit à l'église baptiste de la rue Saint-André. La première fois qu'il assista au culte, personne ne lui adressa la parole. Alors, comme l'assistance quittait le bâtiment, il se tourna vers son voisin et lui dit : "J'espère que vous vous portez bien, Monsieur ?", ce qui entraîna la conversation suivante :

- Monsieur, je ne vous connais pas.

- Et cependant, nous sommes frères.

- Je ne vois pas bien ce que vous voulez dire.

- Eh bien, lorsque j'ai pris le pain et le vin, il y a un instant, symboles de notre fraternité en Christ, je l'ai fait sincèrement. Pas vous ?

Ils avaient alors atteint la rue et l'homme, posant les mains sur les épaules du jeune Spurgeon, déclara : "O sainte simplicité ! Vous avez tout à fait raison, mon cher frère, tout à fait raison. Venez prendre le thé chez moi".

Il lui demanda de revenir le dimanche suivant. Par la suite, il l'invita chaque dimanche et une amitié durable s'installa entre eux.

___________

La question des relations entre les générations n'est pas nouvelle. Il y a seulement des spécificités de notre époque où tout va plus vite, où le changement de génération, dans certains cas, semble s'opérer tous les 10 ans – et non plus tous les 40 ans comme auparavant. La technologie introduit aussi cette nouveauté : ce sont les enfants, voire les petits-enfants, qui peuvent montrer à leurs parents “comment ça fonctionne” !

Il y a donc des situations nouvelles... bien que la parole de l'Ecclésiaste demeure vraie : Ce qui est arrivé arrivera encore, ce qui a été fait se fera encore. Rien de nouveau ne se produit sur la terre. S'il arrive quelque chose dont nous disons : ''Voilà du neuf !'', en réalité le même genre d'événement a déjà eu lieu longtemps avant nous (1.9-10 – Frs cour).

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1. Tous égaux

Jeunes et vieux se réjouiront ensemble (Jr 31.13). C'est une prophétie. Le propre d'une prophétie biblique, c'est qu'elle a des accomplissements différés (comme avec les Béatitudes). En fait, ce n'est pas encore (!), mais ça a déjà commencé !

En conséquence, ne plaçons pas la barre trop haut – mais n'attendons pas le retour du Seigneur pour commencer à le vivre. Chaque fois que nous le vivrons, cela aura une dimension prophétique. Cela devrait nous faire envie.

La question des générations n'est pas la seule. Il y a d'autres clivages : économiques, culturels, sociaux, sexuels...Notez que dans tous ces cas, la différence est provisoire !

= Il me semble que nous serons aidés en établissant un parallèle avec le rapport hommes-femmes. Ce n'est pas parce que nous vivons côte à côte que nous nous comprenons parfaitement. Que d'incompréhensions, que de blessures ! Pierre comme Paul s'appliquent à rappeler l'égalité autant que la différence, la différence autant que l'égalité1. Et Pierre précise : … afin que rien ne vienne faire obstacle à vos prières (1 Pi 3.7). Ce n'est donc pas seulement horizontal ou 'social' !

Il y a donc deux manières de faire violence à la réalité : en niant l'égalité et en niant la différence. L'enseignement biblique, à cet égard, est remarquable. L'égalité est très fortement affirmée : hommes et femmes sont également créés à l'image de Dieu (cela implique beaucoup de choses) ; hommes et femmes sont également pécheurs. De ce point de vue, l'égalité est totale !

Ainsi, le vrai problème ce ne sont pas les hommes ou les femmes, comme on a tendance à le croire parfois ; le problème, c'est le péché !Bien sûr, il peut se manifester de manières différentes selon qu'on est un homme ou une femme, mais la racine est la même !

Il en est de même entre les générations ! Nous aurons beaucoup avancé si nous admettons cela.

= Le problème des relations entre chrétiens d'origine juive et chrétiens d'origine grecque présente lui aussi des similitudes avec notre sujet. Ce n'était pas rien ! L'unité de l'Eglise était en jeu, déjà (cf. Ac 6.1ss). C'était là un des soucis majeurs des apôtres.

La Bible parle assez longuement de cette question. Que disent Luc et Paul ? N'imposons pas systématiquement nos habitudes ou nos contraintes à ceux qui sont différents. Ils ont déjà les leurs. Les Juifs avaient leurs atouts et leurs handicaps propres. Les Grecs aussi. Il ne fallait ni les comparer ni les superposer, c'est-à-dire imposer des fardeaux supplémentaires. Il fallait même éviter de se faire de la peine...

Je lis : Ne nous jugeons donc pas les uns les autres ; mais pensez plutôt à ne rien faire qui soit pour votre frère une pierre d'achoppement ou une occasion de chute. Mais si, pour un aliment (ou une autre chose secondaire), ton frère est attristé, tu ne marches plus selon l'amour : ne cause pas, par ton aliment, la perte de celui pour lequel Christ est mort. Que votre privilège ne soit pas un sujet de calomnie. Car le royaume de Dieu ce n'est pas le manger ou le boire, mais la justice, la paix et la joie par le Saint-Esprit. Celui qui sert Christ de cette manière est agréable à Dieu et approuvé des hommes. Ainsi donc, recherchons (les uns et les autres) ce qui contribue à la paix et à l'édification. Pour un aliment, ne détruis pas l'œuvre de Dieu (Ro 14.13-20a).

Deux remarques :

- De nombreux passages bibliques montrent que ce que l'on fait à un chrétien, en bien ou en mal, quel que soit son âge, on le fait à Christ !On ne voudrait pas faire de mal au Seigneur, n'est-ce pas ? Actes 9.5 dit cela de manière bouleversante2.

- Le mot édification, dans la Bible, n'a pas la connotation individuelle que nous lui donnons souvent (cela m'édifie, me fait du bien) ; c'est toujours le sens communautaire qui doit être retenu : édifier, c'est former ensemble un édifice ! Ensemble !

Tout cela éclaire notre sujet : avoir 30 ans ou 80 ans, ce n'est pas la même chose. Mais cela ne change rien à la dignité d'être créé à l'image de Dieu, d'être un enfant de Dieu si on est chrétien, d'avoir reçu le Saint-Esprit, de recevoir des dons de la grâce pour l'édification du corps de Christ, quand bien même je ne pourrais plus quitter mon lit ; cela ne change rien pour ce qui est de la Foi, de l'Espérance et de l'Amour... Tout cela va sans dire, mais c'est bien de le rappeler.

Cela signifie-t-il que tout est pareil ? Non. Nous pourrions établir une longue liste de différences dont certaines ont beaucoup de poids. J'ai déjà mentionné le rythme de vie..., ne serait-ce que dans le débit des paroles prononcées3.

 

2. La maison

La promesse est pour vous, pour vos enfants et pour tous ceux qui sont au loin (Ac 2.39).

Dans la Bible, généralement, tout commence à la maison. Le lieu premier, c'est la maison. L'Eglise est le lieu second (pas secondaire, mais second). Pourquoi dire cela ? Parce que ce qui se vit à la maison conditionne tout le reste (plus que ce qui se vit à l'Eglise). Le creuset, c'est la maison.

A table, à la maison, il y a à manger pour le jeune enfant et pour la personne plus âgée. De même, le prédicateur doit s'adresser à un enfant de 12 ans et à une personne de 90 ans. Le modèle, c'est la maison. Celui qui ne dirige pas correctement sa maison, comment peut-il prendre soin de l'Eglise de Dieu ? (1 Tm 3.5).

Paul, pour parler de son ministère, se compare tour à tour à une mère, puis à un père (1 Th 2.7-12). Paul (qui n'a pas d'enfant) appelle Timothée 'mon enfant' (pourtant Timothée n'est pas un enfant). Jean fait pareil (1 Jn 2.1, 12, 18...). Le modèle du disciple, c'est l'enfant qui écoute et qui apprend. Et nous sommes tous des disciples (hommes et femmes, jeunes et vieux !). Donc nous sommes tous des enfants en train d'apprendre ! Cela signifie-t-il que nous en sommes tous au même point ? Non.

Que dit Paul à Timothée : Exhorte les vieillards comme des pères, les femmes âgées comme des mères(1 Tm 5.1-2).Vous voyez le modèle de la maison ?Qu'est-ce que cela signifie ? Qu'un chrétien jeune peut exhorter une personne âgée, mais qu'il ne lui fait pas la leçon comme s'ils avaient le même âge. Ce serait inconvenant. Je crois que cela est inconditionnel, comme l'est le commandement d'honorer son père et sa mère. Est-ce une question de politesse ? Pas seulement, c'est une forme d'intelligence spirituelle, une forme de piété, c'est-à-dire de respect envers Dieu (Jude 8).

Le mot 'piété' est-il trop fort ? Je ne crois pas. Paul écrit : Que les enfants et les petits- enfants apprennent à exercer la piété envers leur propre famille et à rendre à leurs parents ce qu'ils ont reçu d'eux ; car cela est agréable à Dieu (1 Tm 5.4). Cela vaut aussi dans l'Eglise qui est comme une grande maison.

Cela oblige les plus jeunes, mais cela oblige aussi les plus âgés. Les personnes âgées ne doivent rien faire qui crée un obstacle à l'avancement des générations plus jeunes. Pères, n'irritez pas vos enfants ! Remarquez que les enfants doivent obéir à leurs parents selon le Seigneur, tandis que les pères doivent élever leurs enfantsselon le Seigneur(Ep 6.1-4). Pour tous, la référence, c'est le Seigneur. Personne ne peut faire le fier.

Les personnes âgées ont souvent raison, mais pas toujours. Il leur revient d'être des modèles, y compris en reconnaissant qu'elles peuvent se tromper4 ; y compris en écoutant et en apprenant encore.5 Elihu dit cela de manière surprenante6.

Notez ceci : une personne plus âgée a déjà été jeune ; une personne jeune n'a pas encore été âgée... C'est une grande différence. Cela donne-t-il tous les droits aux personnes plus âgées ? Non.

Je cite, dans ce sens, l'apôtre Pierre : Vous qui êtes jeunes, soyez soumis aux anciens. Et tous, dans vos rapports mutuels, revêtez-vous d'humilité ; car Dieu résiste aux orgueilleux, mais il fait grâce aux humbles. Humiliez-vous donc sous la puissante main de Dieu afin qu'il vous élève au temps convenable (1 Pi 5.5-6). C'est pour tous.

Je relève la mention de l'humilité qui est, normalement, un vêtement qui convient très bien aux chrétiens, jeunes et vieux. “L'humilité, personne ne l'éprouve naturellement, contrairement à l'orgueil qui est plus grave aux yeux de Dieu que bien des péchés. Les prétentions orgueilleuses, voilà ce qui nous éloigne les uns des autres”(Méditation de la Mission Timothée, janv. 2022).

Est-ce plus facile d'être humble quand on est jeune ou quand on est plus âgé ? Je vous laisse répondre. En réalité, ce n'est jamais facile ; c'est même impossible sans la grâce qui nous enseigne ce que nous sommes vraiment. Dans vos rapports mutuels, revêtez-vous d'humilité. Monsieur “Je sais tout” ne donne pas un bon exemple, qu'il soit jeune ou âgé... Le plus humble est celui édifiera le plus.

Dans cet esprit, le conflit de générations disparaît et nous pouvons même nous glorifier les uns des autres, car il n'y a pas de danger à être fier de son frère lorsque je sais reconnaître l'œuvre de Dieu en lui et au travers de lui. Que chaque génération se laisse saisir et étreindre par l’amour du Seigneur. Que les anciens soient renouvelés et qu’en rejetant toute amertume et tout esprit chagrin, ils se réjouissent de la joie du ciel car le fruit de leur travail et leur récompense sont là-haut. Que les jeunes entrent dans la moisson pour venir moissonner ce qui a été semé et semer à leur tour afin de nous réjouir tous ensemble”, écrit Rod Dreher.

Discerner cette égalité et cette différence est un signe d'intelligence spirituelle, je l'ai déjà dit. Dans ce sens, Paul évoque la soumission mutuelle dans la crainte de Christ (Ep 5.21). Qu'est-ce que cela signifie ? Je crois que cela signifie recevoir de l'autre, quel qu'il soit, ce qui vient du Seigneur. Qui va donner l'exemple ? L'unité spirituelle de l'Eglise est en jeu.

(A suivre) 

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Notes :

1On peut lire 1 Co 7.2-5 ; 11.7-12 ; 1 Pi 3.7.

2Je suis Jésus que tu persécutes.

3 Ch. Spurgeon à ses étudiants : Faites tout pour qu'on vous comprenne. Rendez impossible qu'on ne vous comprenne pas !

4C'est le sens du mot 'irréprochable' (Ti 1.7).

5 Je pense aux vers de Victor Hugo, dans Booz endormi : Il y a de la flamme en l'œil des jeunes gens, mais dans l'œil du vieillard, il y a de la lumière. La lumière, c'est la présence vivifiante du Seigneur, c'est vrai ; mais c'est aussi le travail du creuset où l'or se purifie. Or, ce travail est généralement lent... A 70 ans, on a vécu plus de deuils qu'à 25 ou 30 ans. Or, on apprend plus dans les deuils que dans les livres.

6 En réalité, dans l'homme, c'est l'Esprit, le souffle du Tout-Puissant, qui donne l'intelligence ; ce n'est pas l'âge qui procure la sagesse, ce n'est pas la vieillesse qui rend capable de juger (Job 32.8-9).

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