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Le blog de Charles Nicolas
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  • Dans une société déchristianisée où les mots perdent leur sens, où l'amour et la vérité s'étiolent, où même les prédicateurs doutent de ce qu'ils doivent annoncer, ce blog propose des textes nourris de réflexion biblique et pastorale.
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5 décembre 2020

Ministère pastoral féminin (2)

 

4. Le ministère pastoral

On a souvent parlé du ministère pastoral féminin sans préciser ce qu'on mettait derrière l'expression 'ministère pastoral'. Cela aussi explique les divergences et les incompréhensions que l'on a pu constater.

Il faut le reconnaître, l'expression 'ministère pastoral' peut renvoyer à des images et à des réalités fort diverses. En un sens, c'est normal car cette tâche est englobante. Pour autant, est-ce que tout ce qui peut ou doit être fait dans une église relève du ministère pastoral ? Sans doute pas. Quel est l'essentiel, le cœur de la charge pastorale ?

La conception du ministère pastoral, en France, est fortement marquée par le modèle associatif. Par manque de vision sur la nature des ministères (après presque un siècle de Concordat), les églises protestantes se sont mollement installées dans le cadre associatif que le législateur avait conçu en 1905. Ce cadre n'est pas mauvais en soi, mais il ne correspond pas au modèle biblique centré sur la personne de Christ. A peu de chose près, le pasteur est souvent devenu le permanent salarié de l'association, celui qui veille à la bonne marche des activités, celui qui anime parce qu'il a du temps et qu'il a fait des études. Cette compréhension, il faut le reconnaître, est bien réductrice.

Cette conception relativement horizontale de l'Eglise et du ministère a, par exemple, mis en valeur la notion d'accompagnement. Cette notion est belle et importante. Elle privilégie l'écoute, l'instruction, le conseil, l'encouragement. C'est là une part importante du ministère pastoral, mais ce n'est pas le tout de ce ministère1. Deux autres composantes de ce ministère – qui concerne aussi celui des anciens – doivent être ajoutées : veiller à la pureté du message annoncé et diriger (donner la direction).

Il est vrai que des femmes peuvent être capables de faire cela, de par leurs compétences ou leur force de caractère, ou encore par leur discernement et par des paroles avisées. Si c'est le cas, heureuse l'église qui sera à leur écoute. Mais quand Paul écrit qu'il ne convient pas qu'une femme enseigne et prenne autorité sur les hommes (1 Tm 2.12), il semble bien qu'il ne les autorise pas à exercer ce ministère-là, ordinairement confié à des hommes2. Pourquoi ?

Le modèle du couple est pertinent et il est risqué de dire qu'il serait seulement culturel. Beaucoup de tâches, dans la maison, peuvent être réalisées par le mari et/ou par l'épouse. Les rôles, pour autant, sont-ils interchangeables ? Pas entièrement. Il ne s'agit pas d'amoindrir le rôle de la femme, appelée à diriger sa maison (1 Tm 5.14), mais cette direction est normalement vécue en lien avec celle qui échoit au mari (1 Tm 3.4). Il en est de même de la responsabilité parentale : si les parents ensemble portent cette vocation (Ep 6.1), les pères ont une fonction propre et sont (normalement) garants de l'émancipation et de la maturité des enfants (Ep 6.4 ; 1 Th 2.7-12).

5. La maison et l'église

L'église n'est pas la maison, mais à bien des égards elle en est le prolongement, de telle sorte que ce qui prévaut dans la maison ne peut pas être ignoré dans l'église (1 Tm 3.1-13). En somme, abolir les différences de vocation entre l'homme et la femme, c'est soit nier les différences créationnelles (avec la notion malléable de genre, par exemple), soit devancer le temps où nous serons comme les anges (Mt 22.30). Dans les deux cas, cela pose gravement question.

Il est étonnant de constater que souvent les mêmes personnes plaident pour le pas encore du temps présent (nous sommes encore pécheurs, etc.) et pour le déjà émancipateur du Royaume de Dieu accompli. Il est vrai qu'il doit y avoir, à ce niveau, une recherche constante de la position juste, et donc une interpellation mutuelle. Mais cela devrait se faire autrement qu'en écho aux pressions sociétales, précisément au moment où les références chrétiennes sont de plus en plus marginalisées, quand elles ne sont pas niées ou combattues.

Toute au bénéfice des bienfaits qui découlent de Jésus-Christ, l'Eglise est tout entière 'pastorale', chacun – et donc tous (et toutes !) – étant participant(es) de ce qui relève de la veille fraternelle et spirituelle, en un mot de l'édification de l'Eglise comme un corps. (1 Co 14.12, 26 ; Ep 4.29). Cette exhortation pourrait être adressée aux anciens et aux pasteurs ; elle est adressée à tous les membres de l'Eglise, hommes et femmes. La plupart des verbes qui caractérisent la tâche pastorale sont aussi employés avec la mention les uns les autres qui implique tous les fidèles de l'Eglise, hommes et femmes. Pour autant, si tous les chrétiens sont responsables et participants, tous ne sont pas pasteurs ou anciens, avec la charge de direction qui leur incombe.

La féminisation des pratiques que l'on constate aujourd'hui n'est pas toute négative, nous l'avons dit au sujet de la notion d'accompagnement. Cependant, elle met en oubli des principes fondamentaux de la révélation biblique, y compris des principes qui touchent à l'être même de Dieu qui, s'il possède des caractéristiques féminines, se révèle principalement sinon exclusivement comme père. La féminisation des pratiques – jusqu'à l'éviction du rôle masculin, parfois – semble corriger certaines dérives, mais elle constitue elle-même une dérive dont les conséquences seront importantes et coûteuses.  

Je termine cette réflexion en citant Genèse 2.18 au sujet de la création de la femme. Dieu dit pour l'homme : Je lui ferai une aide semblable à lui. Le verbe aider indique-t-il un rôle second ? En un sens, oui ; cependant, Dieu lui-même est présenté comme ayant “le pouvoir d'aider” (2 Ch 25.8). Ce n'est donc pas une fonction mineure, secondaire. Par ailleurs, qui est “le plus fort” : celui qui aide ou celui qui est aidé ? Enfin, le mot semblable de Gn 2.18 ne pourrait-il pas mettre un terme aux rivalités sous-jacentes ? Nul ne peut nier l'égalité. Pour autant, ne mettons pas en oubli les différences que Dieu a voulues.

6. Pas de ministères pour les femmes ?

Il faut dire tout de suite qu'il y a évidemment des ministères dans l'Eglise3 pour les femmes. Comme dans la maison, ces ministères seront pour une part communs et partagés avec tous les autres chrétiens, hommes et femmes ; pour une autre part, ils seront spécifiques. Faut-il préciser que, pour des chrétiens, l'expression “comme dans la maison” ne devrait pas revêtir le sens péjoratif qu'on lui prête parfois ?

Pourquoi des ministères partagés avec tous ? On pourrait dire : à cause de Genèse 1. Pour ce qui est du péché et de la rédemption, pour ce qui est de l'espérance et de la foi, pour ce qui est de l'amour, pas de différence, nous l'avons dit. C'est le sens de ce qu'affirme Paul ailleurs : Il n'y a plus ni homme ni femme (Ga 3.28). Cela ouvre naturellement un nombre infini de possibilités et d'occasions de participer, que ce soit devant un micro ou de manière plus discrète. Il faut ajouter aussi : pour ce qui est de l'édification, qui est une part essentielle du ministère de tous les chrétiens (avec les pasteurs et les anciens). Dans la Bible, l'édification ne se réduit pas à un discours qui 'fait du bien' à tel ou tel, mais elle comprend tout ce qui contribue à l'unité et à l'avancement de l'assemblée tout entière, en paroles ou en actes.

Dans ce sens, Paul encourage les Ephésiens à dire des paroles qui servent à l'édification et communiquent une grâce à ceux qui l'entendent (4.29). Cela concerne tous les chrétiens et toutes les chrétiennes sans exception. Ce que Paul écrit aux Corinthiens va dans ce sens : Que tout se fasse pour l'édification (1 Co 14.26). Le contexte, ici, est l'usage des paroles de prophétie : des paroles dites de la part de Dieu par les chrétiens, hommes ou femmes ; si possible par tous (14.31) et pour tous ! Ces paroles (qu'il faut examiner, juger) doivent contribuer à l'édification, étant porteuses d'une instruction ou d'une exhortation (14.31). Là encore, les possibilités sont innombrables, selon ce que chacun a reçu. La condition principale à remplir : être fidèle.

Pourquoi des ministères spécifiques ? On pourrait dire : à cause de Genèse 2. Sans contredire ce qui vient d'être rappelé, il ne convient pas qu'une femme enseigne et/ou prenne autorité sur des hommes (1 Tm 2.12)4. Cela n'irait pas dans le sens de l'édification (unité et maturité selon Christ). Même si une femme a l'aptitude pour le faire ? Même dans ce cas, l'aptitude n'impliquant pas automatiquement la légitimité : ce n'est pas parce que je suis capable de faire une chose qu'il me revient de la faire. Mais cela ne peut-il pas s'avérer contre-productif ? Selon les critères humains, sans doute, mais pas selon le modèle biblique qui obéit à une logique différente, éloignée de tout esprit de revendication.

Cette logique différente ne peut-elle pas être incomprise par beaucoup ? Elle le peut bien sûr, mais si on ôte de la Parole de Dieu tout ce qui pourrait n'être pas compris, que restera-t-il ? Un vague message horizontal teinté de spiritualité floue. Ce n'est pas à cela que nous sommes appelés. Mais ne peut-il pas y avoir des exceptions ? Il peut y avoir des exceptions. Ne les laissons pas cependant changer les principes scripturaires.

Parmi les ministères auxquels les femmes peuvent se consacrer, on peut mentionner – la liste n'est pas limitative – les ministères auprès des enfants (est-ce péjoratif ?), les ministères auprès d'autres femmes (Ti 2.3-5), les ministères de type diaconal – dans le registre de l'assistance, du soutien – qui sont innombrables et qui ne sont pas moins spirituels que les ministères de nature pastorale.

Charles NICOLAS, juillet 2020

________________

Annexe

Le “silence” des femmes

A deux reprises dans le passage mentionné (1 Tm 2.11-12), le texte mentionnerait l'écoute “silencieuse“ des femmes. Cela s'accorde-t-il avec ce que nous avons dit sur le ministère de tous ?

Le terme grec (hèsuchia) devrait être traduit par 'de manière paisible' plutôt que 'en silence', ce qui n'est pas la même chose. D'autres passages avec ce même mot (1 Th 4.11 ; 2 Th 3.12 ; 1 Tm 2.2) ne peuvent être compris comme impliquant un silence. L'attitude paisible qui convient aux femmes ne signifie donc pas qu'elles n'ont rien à dire, mais qu'elles doivent demeurer subordonnées (hupotagè). Est-ce faire d'elles des êtres mineurs ? Cette subordination est exactement celle de l'Eglise de Jésus-Christ (hommes et femmes !) qui est appelée à grandir en maturité.

Cela convient à ce qu'écrit Pierre (1Pi 3.1ss). Quand nous lisons que les maris seront gagnés sans parole, cela ne signifie évidemment pas que les épouses doivent s'abstenir de dire quoi que ce soit. Comment une femme silencieuse serait-elle une aide pour son mari ? Si le mari l'interroge, la femme ne devrait-elle pas répondre ? Si le mari se trompe, ne devrait-elle rien dire ?

La responsabilité de la femme (dire des paroles qui communiquent une grâce et servir avec les dons qu'elle a reçus) n'est pas moins grande que celle des hommes. Elle est la même, sans être identique.

_______________

1Voir en annexe quelques remarques sur le ministère des femmes.

2Cette expression est utilisée par le professeur Henri Blocher.

3Rappelons que l'Eglise ne se réduit pas aux réunions dans les salles de culte, loin de là !

 

4Voir en annexe la question du “silence” des femmes mentionnée au verset précédant.

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