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Le blog de Charles Nicolas
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  • Dans une société déchristianisée où les mots perdent leur sens, où l'amour et la vérité s'étiolent, où même les prédicateurs doutent de ce qu'ils doivent annoncer, ce blog propose des textes nourris de réflexion biblique et pastorale.
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22 mai 2020

Amour et vérité - Se parler quand c'est difficile (3)

 

Annexes

 

1. L'amour et le respect

En tant qu'épouse, ai-je réagi irrespectueusement parce que je ne me sentais pas aimée ?

En tant que mari, ai-je réagi avec dureté parce que je ne me sentais pas respecté ?

En tant qu'épouse, ai-je peur de dire : "Tu m'as semblé dur. T'ai-je paru irrespectueuse ?"

En tant que mari, ai-je peur de dire : "Tu m'as semblé irrespectueuse. T'ai-je semblé dur ?"

En tant qu'épouse, est-ce que je refuse de dire : "Je suis désolée" quand mon mari dit : "ça m'a semblé méprisant" ?

En tant que mari, est-ce que je refuse de dire : "Je suis désolé" lorsque ma femme dit : "Tu me sembles dur" ?

En tant qu'épouse, suis-je trop fière pour faire le premier pas et commencer à me montrer plus respectueuse ?

En tant que mari, suis-je trop fier pour faire le premier pas et commencer à me montrer plus aimant ?

En tant qu'épouse, est-ce que je manque à mon devoir en n'insufflant pas d'énergie à mon mari parce que je n'arrive pas à combler son besoin de respect ?

En tant que mari, est-ce que je manque à mon devoir en n'insufflant pas d'énergie à mon épouse parce que je n'arrive pas à répondre à son besoin d'être aimée ?

En tant qu'épouse, est-ce que je dis : "Il n'est pas question que je le respecte tant qu'il ne se montrera pas tendre" ?

En tant que mari, est-ce que je dis : "Il n'est pas question que je l'aime tant qu'elle ne se montrera pas respectueuse" ? (D'après le livre d'Emmerson Eggerichs : L'Amour et le Respect).

________________

 

2. Christ et les siens

Quand Paul écrit aux Thessaloniciens qu'il "rend continuellement grâce à Dieu pour eux tous" (1 Th 1.2), le mot 'tous' englobe ici ceux qui ne vont pas bien, ceux qui s'égarent, ceux qui avancent avec difficulté, ceux qui tombent à tout moment, etc1. Le mot 'tous', dans les lettres du Nouveau Testament, s'applique presque toujours aux chrétiens (et pas à tous les hommes, comme certaines traductions modernes le laissent croire2) : seulement eux, mais tous !

Pourquoi écrit-il cela ? Parce que quand Paul voit un chrétien, il voit le Seigneur au travers de lui ! Paul ne confond pas le chrétien et le Seigneur mais il ne les sépare jamais non plus. Paul a appris cela lors de sa conversion, quand le Seigneur ressuscité lui a dit : "Je suis Jésus que tu persécutes" (Ac 9.5). Saul ne l'imaginait pas. Nous non plus, souvent.

Il y a deux principes sous-jacents à cela :

a. Christ et son corps, c'est tout un, comme Paul le dit : "De même que les membres, malgré leur nombre, ne forment qu'un seul corps, ainsi en est-il de Christ" (1 Co 12.12). "Persévérez dans la prière, pourvoyez aux besoins des saints" (Ro 12.12-13)...Deux communions... qui n'en font qu'une seule, en somme.

b. Ce que l'on fait, en bien ou en mal, à un membre du corps de Christ, on le fait à Christ ! On pourrait développer cela jusqu'à demain. "Celui qui se met en colère ou qui dit 'idiot' à son frère..." (Mt 5.22). S'agit-il seulement de morale ou de politesse ? Il s'agit de la sainteté du peuple de Dieu ! Et "celui qui donne un verre d'eau froide à un de ces petits parce qu'il est mon disciple... c'est à moi qu'il l'a fait !" (Mt 10.42 ; 25.40). Et "celui qui scandaliserait un de ces petits qui croient..." (Mt 18.6). "En péchant de la sorte contre les frères, et en blessant leur conscience faible, vous péchez contre Christ"(1 Co 8.12. Cf. Ro 14.10-16).

En réalité, l'amour du Seigneur pour nous, notre amour pour lui et notre amour pour les frères et les soeurs chrétiens, c'est le même ! C'est ce que dit Jésus en Jean 13, que je traduis ainsi : "De l'amour dont je vous ai aimés, aimez-vous les uns les autres" (13.34). En d'autres termes, notre amour pour les frères (tous !) est un reflet de notre amour pour le Seigneur, un révélateur.

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3. Le devoir et ses limites

Une parole de l'apôtre Pierre le dit clairement : "Comme de bons intendants des diverses grâces de Dieu, que chacun mette au service des autres le don qu'il a reçu... afin qu'en toutes choses, Dieu soit glorifié par Jésus-Christ" (1 Pi 4.10-11).

Dans ce passage, il ressort que chacun est intendant pour le Seigneur et pour les autres d'une grâce particulière qu'il a reçue. Rien ne m'appartient. Je suis un serviteur. Comment dois-je servir de telle sorte que la grâce ne soit pas tarie mais qu'elle atteigne son objectif, toujours ? Et comment le ferai-je si je n'écoute pas correctement ce que Dieu me dit ?

Ici intervient la notion de délégation. Je fais quelque chose parce que quelqu'un me le demande. Je suis en mission. Ce n'est pas mon idée, ce n'est pas mon intérêt, c'est mon service ! Martin Luther illustre cela admirablement ainsi : "C'est Dieu qui lange l'enfant et lui donne la bouillie, mais il le fait par les mains de la mère". Jean Calvin formule la même pensée avec d'autres mots : "Dieu met l'enfant dans les bras de la mère et lui dit : Prends soin de lui de ma part, maintenant". "De ma part", c'est-à-dire en mon nom. L'enfant est confié par Dieu ; la mère en a la charge. Elle va en prendre soin de la part de Dieu, avec grande humilité, grande application et grande constance.

C'est ici la notion de vocation qui s'applique à toute fonction, tout métier, y compris celui de magistrat ou de soldat. Un soldat qui oublie cela devient un brigand ! Un soldat a sa solde : il n'est en aucun cas là pour son intérêt personnel, et il n'a nul besoin de colère ou de haine pour être un bon soldat. Il est un serviteur, quel que soit son grade.

Le centenier de Luc 7 démontre admirablement cette notion de service, avec le lien qui existe entre la soumission et l'autorité : je possède une partie de l'autorité de celui qui m'envoie, pour autant que je lui suis soumis. Nulle autonomie en la matière. Jésus a admiré l'intelligence du centenier.

A cela correspond la notion de justice : je dois faire ce qui est juste, ni plus, ni moins. A cela correspond donc la notion de limite : ce qui ne m'est pas demandé ne me concerne pas. Un autre va s'en charger. En d'autres termes, prendre trop à coeur une cause est aussi dangereux que de la négliger. Dans les deux cas, il y a une anarchie. On pourrait trouver beaucoup d'exemples3.

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4. A la fois plus d'égards et plus d'exigence

C'est une manière de toucher la double dimension de l'amour et de la vérité. Je ne veux pas aborder trop directement la question de la discipline dans l'Eglise, mais il est impossible de l'éviter tout à fait. C'est comme dans une maison. Si la discipline est habituellement respectée et qu'un jour il y a un écart, cet écart est généralement assez vite circoncrit et réglé. Mais si la discipline commune a pris du retard... alors, c'est plus compliqué.

L'Ecriture nous montre à plusieurs reprises qu'il y a tout à la fois plus d'égards et plus de sévérité dans les relations propres aux membres du peuple de Dieu. Tout le monde n'est pas à même de le comprendre aisément. C'est pourtant comme cela que Dieu lui-même agit avec nous : "Et vous avez oublié l'exhortation qui vous est adressée comme à des fils: Mon fils, ne méprise pas le châtiment du Seigneur, et ne perds pas courage lorsqu'il te reprend ; Car le Seigneur châtie celui qu'il aime, Et il frappe de la verge tous ceux qu'il reconnaît pour ses fils. Supportez le châtiment : c'est comme des fils que Dieu vous traite ; car quel est le fils qu'un père ne châtie pas ? Mais si vous êtes exempts du châtiment auquel tous ont part, vous êtes donc des enfants illégitimes, et non des fils" (Hé 12.5-8).

a. Plus d'égards, nous avons vu pourquoi : à cause du lien de chaque chrétien avec Dieu. "Celui qui vous touche touche à la prunelle de mon oeil" (Za 2.8), dit le Seigneur.

Paul le dit magnifiquement dans sa lettre aux Romains : "Par honneur, usez de prévenances réciproques" (Ro 12.10). Cela veut dire : Vous êtes plus précieux que vous le pensez, ne vous ébréchez pas mutuellement. En tant qu'êtres humains, certes, mais bien plus encore, immensément plus encore en tant que membres du peuple de Dieu – le contexte impose d'affirmer cela. Ce n'est pas l'homme qui est au centre, ici, c'est Christ !

b. Plus de rigueur aussi. Pour la même raison ! Je rappelle les textes classiques : "Si ton frère a péché, va et reprends-le entre toi et lui seul. S'il t'écoute, tu as gagné ton frère. Mais, s'il ne t'écoute pas, prends avec toi une ou deux personnes, afin que toute l'affaire se règle sur la déclaration de deux ou de trois témoins. S'il refuse de les écouter, dis-le à l'Église ; et s'il refuse aussi d'écouter l'Église, qu'il soit pour toi comme un païen et un publicain (Mt 18.15-17).

On mentionne moins souvent Luc qui dit : "Prenez garde à vous-mêmes.Si ton frère a péché, reprends-le ; et, s'il se repent, pardonne-lui" (Lc 17.3).

_________________

 

5. Juger ou ne pas juger ?

Nous avons souvent entendu rappeler (et rappelé nous-mêmes) qu'il ne fallait pas juger. Cela est écrit clairement dans le Nouveau Testament. « Ne jugez pas afin que vous ne soyez pas jugés » (Mt 7.1). Nous avons aussi remarqué que juste après cette injonction, Jésus donne la marche à suivre

pour « ôter la paille de l'œil » de notre frère (7.5), avant de recommander de « ne pas donner les choses saintes aux chiens » (7.6)... En Luc 6, l'appel à ne pas juger précède la question suivante : « Un aveugle peut-il conduire un aveugle ? » et encore cette leçon : « Le disciple n'est pas plus grand que son maître, mais tout disciple accompli devient comme son maître ». De tout cela, il n'est pas difficile de repérer l'intention du Seigneur : il y a une manière de juger qui est déplacée et qui va créer beaucoup de difficultés, et il y a une manière de juger qui est absolument nécessaire. Précisons que le même terme grec est utilisé dans les deux cas.

Une des leçons est celle-ci : il faut une longue préparation personnelle associée à une démarche collégiale. Cela ressort de l'expérience de Moïse. La précipitation (en Egypte – Ex 2.11-15) a été catastrophique. Il faudra à Moïse quarante années d'apprentissage comme berger dans le désert, et l'avertissement de Jéthro : « Tu ne pourras y arriver seul, choisis des hommes sages qui puissent juger avec toi » (Exode 18 ; cf. Pr 3.5, 7).

Quand Jésus dit : « Si ton frère a péché, va et reprends-le entre toi et lui seul... S'il ne t'écoute pas, dis-le à l'église »(Mt 18.15-17), il rappelle cette double dimension – personnelle et communautaire – de la démarche.

L'apôtre Paul reprend exactement le même discours qui pourrait avoir pour titre : Devenez adultes !

« Frères, ne soyez pas des enfants pour ce qui est du jugement. Soyez des hommes faits ! » (1 Co 14.20). Ici, être un enfant, c'est juger n'importe comment ; être adulte, c'est exercer un jugement fiable. Il y a donc deux écueils à éviter : celui d'agir trop vite, impulsivement, et celui de ne plus intervenir d'aucune manière... pour ne pas se tromper.

Quand Jésus dit de ne pas juger en Luc 6, il utilise juste après le verbe condamner (v. 37), comme un synonyme. Paul, en Romains 14.3 et 10, associe les verbes juger et mépriser : « Pourquoi juges-tu ton frère, pourquoi le méprises-tu, puisque nous comparaîtrons tous devant le tribunal de Christ ? ». Cela, c'est le sens négatif du verbe.

Mais quand Jésus ajoute que « un arbre se reconnaît à ses fruits » (Lc 6.44), ou qu'il ne faut pas « jeter les perles aux pourceaux » (Mt 7.6), il montre que juger n'est pas nécessairement mépriser : c'est aussi un discernement élémentaire que chacun est appelé à exercer. C'est le sens positif de ce verbe.

Si on me présente un panier de champignons ramassés dans les bois, je vais regarder attentivement et mettre de côté ceux qui ne sont pas bons. C'est exercer un jugement, et dans ce cas, c'est une question de vie et de mort. Quand Paul dit aux chrétiens de Thessalonique (et à nous) : « Examinez toutes choses et retenez ce qui est bon » (1 Th 5.21), il recommande d'exercer la même responsabilité. Un enfant, déjà, devrait l'apprendre.

Enfin, l'Evangile de Jean utilise le verbe juger d'une manière qui peut paraître contradictoire :

« Dieu n'as pas envoyé son Fils pour qu'il juge le monde, mais pour le sauver » (3.17) ;

« Celui qui croit en lui n'est pas jugé ; mais celui qui ne croit pas est déjà jugé » (3.18).

Cela situe l'action de juger (se prononcer sur quelqu'un) dans la perspective de Dieu et montre que :

  • d'une part, il ne faut pas juger car Dieu seul le peut. Qui suis-je moi pour le faire justement ?

  • d'autre part, si Dieu le peut, c'est donc une action juste et nécessaire qui peut m'être confiée, pour autant que je sois à ma juste place et puisse agir en son Nom.

Romains 13 rappelle que le magistrat – même non chrétien – a reçu cette délégation et cette autorité pour approuver ceux qui font le bien et châtier ceux qui font le mal.

Paul dit même que toute action doit pouvoir être jugée dans l'église : « Ne savez-vous pas que les saints jugeront le monde ? Et si c'est par vous que le monde est jugé, êtes-vous indignes de rendre les moindres jugements ? Ne savez-vous pas que nous jugerons les anges ? Et nous ne jugerions pas à plus forte raison des choses de cette vie ?... Ainsi, il n'y a pas parmi vous un seul homme sage qui puisse prononcer entre ses frères ? » (1 Co 6.2-5).

La question n'est donc pas : Faut-il juger ou s'abstenir ? La question est : Comment remplacer les jugements charnels (laxistes ou intransigeants) par des jugements spirituels exercés de la part de Dieu ? Dans la parabole de la poutre et de la paille, Jésus ne dit pas : Il n'y a rien à faire ! Il dit : Avant d'intervenir pour aider ton frère, il y a quelque chose à faire dans ta propre vie. Après tu pourras intervenir avec justesse ; et il sera important de le faire.

Il y a deux écueils : la précipitation qui va avec l'orgueil ou la légèreté, et la passivité qui se nourrit d'excuses ou de paresse. Ce qui va permettre au chrétien d'éviter ces écueils, c'est son aptitude à accueillir lui-même ce que Dieu a à lui dire, éventuellement par l'entremise d'un frère ou d'une sœur. Celui qui accepte d'être repris, conseillé, instruit, exhorté, consolé pourra alors, le moment venu et d'une bonne manière, reprendre, conseiller, exhorter, consoler. Ce sera comme un fruit de la grâce, quelque chose qui vient de Dieu.

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6. Le perfectionnisme

Il existe maints ouvrages pour dénoncer le relâchement des chrétiens et l'assoupissement des églises, mais il est moins fréquent de voir traiter la tentation opposée qui touche également nombre de chrétiens : le perfectionnisme.

Le perfectionnisme est pour la perfection ce que l'intégrisme est pour l'intégrité : une utilisation excessive, un mauvais usage qui, au lieu de porter de bons fruits, en porte d'amers.

En quoi consiste cette erreur et comment y échapper ?

Le perfectionniste ne retient que deux aspects de la réalité présente : le bien et le mal. Il veut rejeter le mal et s'attacher au bien, ce qui semble être une bonne disposition. Mais il oublie deux choses :

  • le mal n'est pas seulement extérieur à l'homme, mais intérieur, et nos meilleures intentions sont elles aussi contaminées, souillées par le péché ;

  • le bien que Dieu nous demande de vivre, nous n'avons pas la capacité de le pratiquer pour répondre à son attente (Rom 7.18-19).

Ainsi, celui qui vient à la lumière est-il conduit à un double constat :

  • il ne peut par ses propres forces lutter contre le péché qui est attaché à son cœur : il doit renoncer à cette lutte ;

  • il ne peut par ses propres forces accomplir le bien que Dieu attend de lui : il doit aussi y renoncer...

Ce double renoncement (relaté en Romains 7) suppose un tel échec de notre volonté propre et de nos prétentions qu'il équivaut à une mort (Rom 6.4 ; 7.4-6), une sorte d'anéantissement de notre ancienne nature et à un recours total à la grâce de Dieu : non seulement pour le pardon de nos péchés, mais aussi pour la purification et pour l'obéissance de la foi – qui est tout autre chose que l'obéissance de la loi (Rom 10.1-4 ; Gal 5.4).

Le perfectionniste n'est jamais satisfait, sauf quand son illusion est totale vis-à-vis de lui-même (Luc 18.11). Il est malheureux car il est tour à tour confronté à la tentation de se croire meilleur ou pire que les autres. Il est seul. Il ne fait pas confiance : il prend les autres pour des sots. Il est malheureux – et il rend son entourage malheureux – car il est difficilement accessible, étant prisonnier de ses raisonnements nourris de crainte ou de prétention (Rom 10.21). Enfin, le perfectionniste pense souvent qu'il est le seul à souffrir. Il a peu de compassion.

Le perfectionniste est inévitablement exposé au légalisme, car il place les principes qu'il a sélectionnés au dessus de toute autre considération (Mat 23.23-24). Il peut aussi, à certains moments, être tenté de tout lâcher, tellement son cœur a besoin d'amour et de liberté... Le perfectionniste a du mal à accepter d'être aimé tel qu'il est. Il reçoit peu d'amour et en donne peu (1 Cor 13.1-3). Il a peu de joie et en communique peu....

Le perfectionniste ne peut vivre une communion intime avec son Sauveur (Gal 5.4-6). En réalité, si un perfectionniste rencontrait Jésus, il trouverait maintes choses à lui reprocher !

Le perfectionniste doit apprendre ou ré-apprendre qu'il ne peut pas davantage marcher dans la volonté de Dieu par ses propres forces qu'il ne pouvait obtenir le salut par ses propres forces. Il doit accepter que sa dépendance vis-à-vis de l'amour de Dieu, de la grâce qui est en Jésus-Christ et du secours du Saint-Esprit est totale. C'est là une grande humiliation assurément, un brisement même, mais qui seront suivis par un relèvement bienfaisant avec des forces et une joie nouvelles (Jacques 4.10 ; 1 Pierre 5.6).

Seule cette acceptation mettra le perfectionniste en repos, irriguera son cœur de grâce et d'amour, mettra un terme à ses raisonnements de propre justice ou de culpabilité, mettra un terme à l'esprit de jugement ou de supériorité à l'égard des autres. Seule cette acceptation introduira dans sa vie la dimension du Royaume de Dieu qui glorifie le Seigneur.

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7. Faire acception de personnes

Cette expression signifie : user de préférences selon les personnes, pour des motifs de calculs injustes. Le texte le plus explicite se trouve au chapitre 2 de la lettre de Jacques : "Supposé qu'il entre dans votre assemblée un homme avec un anneau d'or ou un habit magnifique...". Cela nous fait sourire. Nous ne devrions pas, car nous sommes tous susceptibles d'user de préférences, pour une multitude de raisons inavouées. Je voudrais mentionner deux champs d'application :

1. Les liens de famille au sein de l'assemblée. Ce sujet est délicat. C'est plutôt une bénédiction pour une famille d'être largement représentée dans une église locale. Dieu aime les familles et Dieu aime l'église locale ! Mais comment articuler les deux ? La règle est sans doute de ne pas confondre la famille et l'église, quand bien même les membres appartiendraient à l'une et l'autre de ces deux sphères : des règles différentes les gèrent l'une et l'autre, l'une et l'autre n'ayant pas des horizons identiques. Ce qui est délicat, c'est que dans une certaine mesure le couple et la famille priment (1 Co 7.12-16 ; 1 Tm 3.4-5 ; 5.4). Mais dans une autre mesure, l'église prime, c'est-à-dire l'intérêt du plus grand nombre et la perspective du Royaume de Dieu (Mt 10.35 ; Mc 10.29 ; 1 Co 7.29-31). Un certain nombre de précautions devraient être prises pour prévenir les risques.

2. Les différences de statuts, de fonctions. Comme chrétiens, nous sommes tous égaux (pécheurs pardonnés) et Dieu peut utiliser qui il veut. Autour de la table du Seigneur, il n'y a plus d'hommes et de femmes, de parents et d'enfants, de maîtres et de serviteurs. Cependant, dans la vie de tous les jours, ces positions ne sont pas entièrement abolies, y compris au sein de la communauté chrétienne : les positions des uns et des autres (âges, fonctions, statuts...) ne sont pas toutes équivalentes. Il faut en tenir compte. Je pense à l'âge : je peux reprendre une personne plus âgée que moi, mais je dois tenir compte de cette différence (cf. 1 Tm 5.1). Une femme peut-elle reprendre un homme ? Sans doute, mais elle devrait tenir compte de la différence. L'homme aussi, d'ailleurs, pour d'autres raisons. Un serviteur peut-il reprendre son maître ? Peut-être, mais avec des égards, "dans la crainte du Seigneur" (Co 3.22). Même chose pour un enfant vis-à-vis de ses parents (1 Tm 5.4). Le maître aussi doit user d'égard envers son employé, notamment si c'est un frère dans la foi. Même chose vis-à-vis d'un ancien de l'église (à la fois plus d'égards et plus de sévérité, 1 Tm 5.19-20).

Cela est d'autant plus important aujourd'hui où toute notion de hiérarchie, d'autorité et de préséance est regardée comme archaïque. Ces notions, pourtant, revêtent une grande signification aux yeux de Dieu (cf. Jude 8-11).

Tenir compte de ces différences, est-ce "faire acception de personnes" ? Non, car il ne s'agit pas de calculs intéressés, il ne s'agit pas de différentes mesures de justice.

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8. La communion quant à la conduite

selon Jean Calvin

"Quant à l'imperfection de la conduite, nous devons bien plus en supporter, car il est facile de trébucher à cet endroit. Puisque, bien qu'elle soit sainte (Ep 5.26), le Seigneur prononce que son Eglise sera sujette à misère jusqu'au jour du jugement, c'est en vain que certains la cherchent pur et nette.

Tous les fidèles doivent se souvenir de ces recommandations, de peur qu'en voulant être trop grands zélateurs de justice, ils ne s'éloignent du règne des cieux qui est le seul vrai règne de justice. Car Dieu veut qu'on garde la communion de son Eglise telle que nous la voyons entre nous en demeurant en son sein : celui qui s'en sépare est en grand danger de se retrancher de la communion des saints.

Dès lors, que ceux qui ont une telle tentation pensent qu'en une si grande multitude, il y en a beaucoup qui leur sont cachés et inconnus, qui néanmoins sont vraiment saints devant Dieu.

Qu'ils pensent, secondement, que parmi ceux qui leur semblent vicieux, il y en a beaucoup qui ne se complaisent pas et ne se vantent pas en leurs vices (défauts), mais sont souvent émus de la crainte de Dieu, d'aspirer à une vie meilleure et plus parfaite.

Troisièmement, qu'ils pensent qu'il ne faut pas estimer un homme après un seul fait, d'autant qu'il advient parfois aux plus saints de trébucher bien lourdement.

Quatrièmement, qu'ils pensent que la Parole de Dieu doit avoir plus de poids et d'importance pour conserver l'Eglise en son unité que n'a la faute de quelques mal-vivants à la dissiper.

Qu'ils pensent finalement, quand il est question d'estimer où est la vraie Eglise, que le jugement de Dieu est préférable à celui des hommes.

Il y a toujours eu des personnes qui ont fait croire qu'elles avaient une sainteté parfaite, comme si elles eussent été des anges du Paradis, et qui sont arrivées à mépriser la compagnie des hommes qu'elles jugeaient trop faibles.

Ainsi, certains prêchent par un zèle de justice inconsidéré, considérant qu'il y a pas Eglise si le fruit ne correspond pas à la doctrine. Certes, Dieu corrigera ceux qui, par paresse, donnent un mauvais témoignage au risque de troubler ceux qui sont faibles dans la foi.

Néanmoins, ceux qui sont trop sévères se trompent aussi en ce qu'ils oublient la clémence dont le Seigneur lui-même fait preuve.

Il est vrai que les pasteurs ne veillent pas toujours de près et, parfois aussi, sont plus faciles et doux qu'il conviendrait ; ou encore sont empêchés d'exercer une sévérité telle qu'ils le voudraient. Il en résultera que de nombreux impénitents se tiendront parmi les fidèles. Je confesse que cela est un défaut qui ne peut être regardé comme léger, puisque S. Paul le reprend sévèrement.

Mais si l'Eglise ne s'acquitte pas de son devoir, cela ne signifie pas que chacun doive décider de se séparer d'avec les autres (...) C'est une chose de fuir la compagnie des mauvais et autre chose, par haine d'eux, de renoncer à la communion de l'Eglise."

Institution chrétienne IV.I, 13, 15, 16.

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9. La nécessité d'une discipline

"Les marques pour identifier la vraie Église sont les suivantes : l’Église use de la pure prédication de l’Évangile, elle use de la pure administration des sacrements comme Christ les a ordonnés ; la discipline ecclésiastique est en usage pour corriger les vices ; bref, on a pour règle la pure Parole de Dieu, rejetant toutes choses contraires à celle-ci, tenant Jésus-Christ pour seul Chef. Par cela, on peut être assuré de connaître la vraie Église, et ce n’est le devoir de personne d’en être séparé.

Quant à ceux qui sont de l’Église, on peut les connaître par les marques des chrétiens, à savoir, par la foi ; lorsqu’ils ont reçu un seul Sauveur Jésus-Christ, ils fuient le péché, ils suivent la justice, aimant le vrai Dieu et leurs prochains, ils ne se détournent ni à droite ni à gauche, ils crucifient leur chair avec ses actes. Non pas qu’ils n’aient aucune infirmité en eux, toutefois ils combattent par l’Esprit, chaque jour, ayant continuellement recours au sang, à la mort, à la passion et à l’obéissance du Seigneur Jésus, par la foi, en qui ils obtiennent la rémission de leurs péchés".

Confession réformée des Pays-Bas (1561), dite Belgica, article 29

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10. Sortir d'un conflit

D'après le professeur Frédéric Rognon

1. Reprendre le dialogue. Pour cela, il faut le proposer, en y étant prêt.

  • reconnaître ses torts – cela désarme la relation !

  • dialoguer – cela permet d'écarter maintes fausses idées...4

  • parler en "je" et pas en "tu" (communication non violente)

  • exprimer un affect et un besoin5.

2. Faire appel à une tierce personne impartiale pour lui demander de me dire les qualités de l'autre et sa souffrance. Redécouvrir l'autre au travers du regard d'un tiers impartial. On appelle cela la triangulation6.

3. Recadrer, avec le recours à une autorité : rappeler la règle, la mission, les limites. L'objectif est d'éviter la sanction.

4. Avoir recours à un médiateur, sur la base d'un accord.

- Le médiateur doit être extérieur et impartial, pour éviter les interférences.

- Le médiateur ne se substitue pas : il doit faire surgir la solution des personnes elles-

mêmes (à la différence du conciliateur qui propose une solution, un compromis).

- Le médiateur rappelle les 'règles du jeu' (la forme avant le fond) :

. se parler respectueusement

. ne pas s'interrompre

. confidentialité absolue

. s'engager à respecter la résolution adoptée afin de se rapprocher d'une procédure.

. se placer en triangle pour inviter chacun à tourner la tête vers l'autre.

Le médiateur va repérer le moment où la difficulté a commencé et va dédramatiser.

Tout cela peut se dérouler sur plusieurs séances.

Quand ce repérage est fait, le médiateur va demander que A et B proposent des solutions. « Qui veut commencer ? »

Et quand une des parties ne veut pas avancer ?

Certaines personnes peuvent trouver leur compte dans une situation conflictuelle :

  • victimisation (paranoïa)7

  • peur du changement

  • groupes d'identité qui ont besoin de conflits pour exister

  • repli sur soi, tentation du cocon.

Il faut convaincre la personne qu'en sortant du conflit elle s'en trouvera mieux qu'en y restant.

Un faux consensus est pris sans conviction, par lassitude.

La décision n'est alors pas mise en œuvre.

Il va de soi que cette discipline n'exclut aucunement l'action de Dieu.

________________

 

11. Ecouter

« Le premier service que l'on doit au prochain est de l'écouter. De même que l'amour de Dieu commence par l'écoute de sa Parole, ainsi le commencement de l'amour pour le frère consiste à apprendre à l'écouter.

Les chrétiens, et spécialement les prédicateurs, croient souvent devoir toujours « offrir » quelque chose à l'autre lorsqu'ils se trouvent avec lui ; et ils pensent que c'est leur unique devoir. Ils oublient qu'écouter peut être un service bien plus grand que de parler.

Qui ne sait pas écouter son frère bientôt ne saura même plus écouter Dieu ; même en face de Dieu, ce sera toujours lui qui parlera... Nous devons écouter avec les oreilles de Dieu, afin de pouvoir nous adresser aux autres avec sa parole ». Dietrich BONHOEFFER (De la vie communautaire)

_________

 

12. L'engagement de loyauté

 

Dans l'obéissance à la Parole de Dieu,

je veux m'engager à donner un bon témoignage

de mon frère ou de ma sœur en Christ.

Si cela n'est pas possible, je dois préférer rester silencieux et,

après avoir prié à ce sujet, aller rencontrer discrètement la personne,

pour lui expliquer pourquoi il ne m'est pas possible

de donner d'elle un bon témoignage.

 

Si Dieu me le demande, je dois rencontrer

toute personne ayant commis une faute avec un amour véritable,

ayant premièrement examiné et corrigé mes propres attitudes et actions.

 

C'est seulement dans le cas où ma démarche

n'est pas favorablement accueillie

que je pourrai partager ce problème avec d'autres

et cela seulement en accord avec les principes enseignés en Matthieu 18.15-18.

 

Si je ne respecte pas cette conduite, je m'engage à demander pardon

et à poursuivre la démarche de réconciliation,

sachant que Dieu résiste aux orgueilleux,

mais qu'il donne sa grâce à celui qui est humble.

 

(Eglise presbytérienne de Matthews, Caroline du Nord)

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13. L'accord du sel

Avec l’aide de Dieu et en comptant sur sa grâce, je m'engage :
- à vivre dans la lumière et la vérité vis-à-vis de mes frères et sœurs (1 Jn 1.7 ; 2.9-10).

- à refuser l'esprit de critique, de médisance et de jugement de mes frères et sœurs, afin de ne pas donner l'occasion à Satan de nous diviser (Lc 11.23 ; Jn 10.12 ; 1 Pi 2.1).

- à rechercher l'unité et le consensus dans toutes les équipes dans lesquelles je servirai le Seigneur au sein de l’assemblée. Je refuserai de faire de mon point de vue, surtout s'il est minoritaire, un obstacle à la prise de décision (Jn 17.23 ; Ep4.3).

- à accepter, dans un esprit de soumission les uns envers les autres, que mes points de vue particuliers sur des sujets de seconde importance (qui ne touchent pas aux doctrines de base de notre Déclaration de foi) ne soient pas retenus (Ep 5.21 ; 2 Jn 1.1).
- ne soupçonnant pas le mal, à chercher à résoudre les problèmes et malentendus
qui pourraient surgir dans mes relations fraternelles, afin de ne pas donner l'occasion à Satan, notre ennemi commun, de diviser l'Assemblée (1 Pi 5.5, 8-9).

- à chercher l'unité, même si celle-ci ne signifie pas uniformité ; on a tous le droit de ne pas être d'accord et de l'exprimer, avec tact et amour, et d'abord avec les personnes concernées, en nous rappelant que « l'amour est le lien de la perfection » (Col. 3.14).

En cas de désaccord majeur. En cas de désaccord profond sur la doctrine, la vision, ou une décision considérée comme majeure de mon point de vue, plutôt que de diviser l'Eglise, et si aucun terrain d'entente n'a été trouvé au préalable, je suis d'accord de démissionner sans faire de vague, remettant à Dieu le sort de son Eglise en Lui demandant de diriger les anciens et l’assemblée pour la suite (1 Sa 15.22-23; Jn 17.9,11 ; Ph 1.15-19).

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Notes. 

1Je n'aborde pas ici la question de la discipline dans l'Eglise, car ce sujet sera abordé en décembre, je crois. Voir l'annexe 1 : La communion quant à la conduite, de J. Calvin.

2 "Poursuivez toujours le bien, soit entre vous, soit envers tous" (1 Th 5.15). Je pense que Paul parle ici de la communauté locale et des chrétiens qui se trouvent au-delà, comme il le fait en 1 Co 1.2. Voir en annexe la citation de Calvin sur la communion quant à la conduite.

3Je pense à l'amour maternel excessif, avec les dégâts qu'il peut occasionner. Le risque est celui d'une idolâtrie... de soi. On pourrait mentionner aussi la sévérité excessive d'un père. Quand je gronde mon enfant, c'est pour moi ou pour lui ?

4Il est fréquent que l'objet du conflit ne soit pas cerné avec exactitude. Il y a souvent "un objet derrière l'objet". Si celui qui parle peut aller jusqu'au bout de ce qu'il a à dire (ne pas s'interrompre), la vraie cause peut paraître.

5Beaucoup de conflits sont dus à un manque de reconnaissance, ce qui engendre des frustrations, de l'amertume, de la jalousie.

6Souvent les proches (conjoint, enfants...) produisent un effet de radicalisation. Mieux vaut parler sans eux.

7Une personne qui ne va pas bien cherche souvent un responsable. Les infirmières le savent bien...

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